Aujourd’hui à 14 heures, débutera la réunion d’urgence de la CEDEAO. Le nouveau président malien Assimi Goïta, à l’origine des deux putschs, sera présent. Du côté français, Macron menace de retirer l’armée française du Mali.
Le chef de la junte malienne à l’origine des deux coups d’Etat, Assimi Goïta, s’est rendu à Accra pendant la nuit. Nouvellement désigné président par intérim par la Cour constitutionnelle du Mali, il rejoindra les pourparlers de la CEDEAO. Le bloc ouest-africain avait déployé Goodluck jonathan et Jean-Claude Brou à Bamako le 25 mai. Avant que les médiateurs de la CEDEAO puissent négocier la réinstallation du président démis Bah N’Daw, ce dernier avait déjà présenté sa lettre de démission. Selon plusieurs médias, dont Africa Intelligence, ce serait le président ivoirien Alassane Ouattara qui fait actuellement pression pour des sanctions à l’encontre d’Assimi Goïta. Ouattara, très proche du chef d’Etat français Emmanel Macron, semble déterminé à réaliser les souhaits de Paris.
Du côté français, Macron a « menacé » de retirer ses militaires du Mali. Selon Macron, qui a dénoncé « un coup d’Etat inacceptable », le Mali irait vers « un islamisme radical ». Une déclaration plus qu’étrange, dans la mesure où depuis que Barkhane s’est installée au Mali, le pays n’a jamais été plus menacé par le terrorisme islamiste que maintenant. Certainement, au niveau purement corrélatif, la présence française progresse plus étroitement avec la menace terroriste que le règne militaire au Mali.
Les chefs d’Etats de la CEDEAO très impliqués
Le chef d’Etat malien, Assimi Goïta, a quitté Bamako dans la nuit du 29 mai. Il assistera au Sommet extraordinaire de la CEDEAO sur la situation au Mali, sur invitation de Nana Akufo-Addo. Au cours de la journée, Goïta aura un tête-à-tête avec son Akufo-Addo. Ensuite, ils assisteront ensemble à la réunion avec d’autres chefs d’Etats et des responsables de la CEDEAO.
La réunion commencera à 14 heures. Les deux chefs d’Etats les plus impliqués dans la Transition malienne, Faure Gnassingbé et Mohamed Bazoum, seront sans doute représentés. Le président nigérien avait médié la transition malienne au nom de l’Union africaine (UA) depuis deux mois. Plus officieux, le président togolais Faure Gnassingbé avait tissé de solides liens avec Assimi Goïta, essayant de le convaincre de collaborer davantage avec la France.
Toutefois, ce sera le président ivoirien Ouattara qui pèsera le plus lourd sur les pourparlers. Ouattara avait suggéré les sanctions appliquées sur le Mali après le premier coup d’Etat de 2020. Selon des sources du Journal de l’Afrique, il s’était entretenu avec Nana Akufo-Addo, président de la CEDEAO, au moins à cinq reprises durant les quatre derniers jours.
Selon Jeune Afrique, le président guinéen Alpha Condé et son homologue congolais Denis Sassou-Nguesso auraient aussi longuement discuté avec Assimi Goïta. Les deux présidents voulaient s’assurer que le président démis Bah N’Daw était correctement traité.
Evidemment, la CEDEAO a déjà condamné le coup d’Etat malien. Toutefois, une marge de manœuvre existe encore pour les pourparlers. Pour Goïta, l’installation d’un gouvernement majoritairement civil est déjà en discussion, en partenariat avec le mouvement M5-RFP. L’opposant Choguel Maïga sera Premier ministre de la nouvelle administration malienne. Néanmoins, le sujet brûlant reste le rapport de la CEDEAO avec la France.
Macron menace, Goïta esquive
En effet, dans un entretien au Journal du dimanche, Emmanuel Macron a averti que Paris ne resterait pas aux côtés d’un « gouvernement illégitime ». Il a aussi affirmé avoir « passé le message » aux dirigeants des pays de la CEDEAO que la France ne resterait pas les mains dans les poches.
Cependant, tout ce dont Macron a menacé, à savoir le retrait de Barkhane, serait une bénédiction pour Goïta. En effet, le chef de la junte s’est opposé aux dernières interventions militaires françaises dans son pays. Ses lieutenants ont même accusé Barkhane de meurtres civils. Des accusations qui ont été confirmées par le rapport de l’ONU sur le bombardement de janvier.
Au cours des derniers jours, des manifestations ont aussi dénoncé l’ingérence française au Mali. Les manifestants ont aussi exprimé leur soutien aux autorités militaires et à Assimi Goïta. Certains d’entre eux portaient des drapeaux russes, et plaidaient un partenariat avec la Russie. Selon les manifestants, ce serait le moyen de se débarrasser de l’interventionnisme français au Mali.
Clairement, les menaces françaises, pour peu qu’elles soient prioritaires pour les dirigeants de la CEDEAO, ne le sont pas pour le président malien. De même, les éventuelles sanctions de la Communauté économique ont démontré lors de leur dernière application fin 2020 qu’elles nuisaient plus aux autres pays de la CEDEAO. Qu’est-ce que la CEDEAO pourrait bien vouloir dire à Assimi Goïta ?