L’Ever Given, le navire qui s’était coincé dans le canal de Suez entre le 23 et le 30 mars, n’a toujours pas quitté le port. Après de longues négociations, le porte-conteneurs a été saisi par les autorités égyptiennes en attendant que les parties responsables s’accordent pour payer l’amende de 900 millions de dollars.
Selon un porte-parole de Shoei Kisen, l’armateur de l’Ever Given, le porte-conteneur de 400 mètres de long a été saisi au Port Suez, où il a été acheminé après avoir été libéré. L’Ever Given avait bloqué le Canal de Suez pendant une semaine, causant un manque à gagner de 60 milliards de dollars à toutes les parties lésées. L’autorité du canal de Suez (SCA) a donc réclamé 900 millions de dollars d’indemnités à la société taiwanaise Evergreen Marine, qui exploitait le navire. « On ne peut pas commenter les détails des négociations », a déclaré Evergreen.
Entre les propriétaires des conteneurs, les assureurs japonais de l’armateur et la SCA, ce bras de fer en est à sa sixième journée. Le problème, c’est que toutes les parties s’attendent à ce que l’assureur, Mitsui Sumitomo Insurance (MSI), apprécie le contexte des marchandises bloquées pour rembourser les trois souscripteurs au plus vite. Un optimisme que l’Egypte ne partage pas, d’où la saisie du navire.
Jeu de la barbichette avec l’assureur
Les trois compagnies d’assurance des différentes parties exploitant le porte-conteneur, toutes japonaises et représentées par MSI, se sont empressées d’évaluer les coûts de renflouement. Ces dépenses ne dépassent pas un million de dollars selon les assureurs. MSI considère aussi que les dégâts sur la coque de l’Ever Given ne peuvent être évalués dans l’immédiat, et que les pertes en marchandises devraient être remboursées solidairement entre tous les propriétaires des conteneurs, selon la procédure d’avarie commune.
Cependant, l’Ever Given transporte des marchandises appartenant à plusieurs milliers d’entreprises. Obtenir un accord entre autant de parties nécessiterait des années. La dernière fois que la loi d’avarie commune a été appliquée dans un incident de cette envergure, le navire avait le huitième de la capacité de l’Ever Given. L’évaluation avait duré quatre ans et le recouvrement des paiements est encore en cours.
Entre la ligne dans le sable qu’ont tracé les autorités égyptiennes, et l’improbabilité qu’un évènement de ce genre se produise, il semble qu’on se dirige vers une impasse qui aura sans doute plus d’ampleur que l’incident à l’origine de cette affaire.
Des perspectives géopolitiques
Selon la perspective que l’on a de cette histoire, le fautif est toujours différent. Il n’empêche que l’affaire d’Ever Given aura des conséquences sur le commerce maritime et l’acheminement des marchandises sur les porte-conteneurs géants en général.
Ces navires défaillants ont transporté 10 milliards de dollars de marchandises par jour à travers le Canal de Suez l’année dernière. 75% des conteneurs transportés par les semblables de l’Ever Given transportaient des marchandises provenant de chine. Dans le cas de l’Ever Given, qui partait vers les Pays-Bas, la situation actuelle montre la dépendance européenne à la marchandise chinoise. Dans certains pays africains, la situation est pire.
Toutefois, l’attention est aujourd’hui portée sur l’Ever Given, chaque jour que le porte-conteneurs ne navigue pas, beaucoup d’argent est perdu. Et bien qu’on soit loin de l’estimation des 10 milliards par jour lorsqu’il bloquait le Suez, cette fois, il y’a des marchandises qui risquent la péremption, et 13 000 moutons bloqués à bord qui pourraient mourir. L’Egypte sera-t-elle raisonnable ? Ou est-ce-que les commanditaires des marchandises à bord trouveront un accord ? Difficile à savoir, mais si un règlement à l’amiable n’est pas atteint, les retombées politiques seraient calamiteuses.