En 1965, pendant sept mois, Che Guevara a rêvé d’une révolution marxiste au Congo belge. Il a finalement dû se résoudre à quitter l’Afrique après cet échec cuisant.
Le 14 mars 1965 au soir, Ernesto Guevara atterrit à La Havane. Un mois plus tôt, le Che, alors à Alger, a prononcé un discours aux accents antisoviétiques. A peine le pied posé sur le sol cubain, Fidel Castro convoque son compagnon de route pour lui demander des explications. Pendant plus de quarante heures, les deux hommes vont rester en tête-à-tête. Ce 14 mars restera dans les annales de Cuba : plus jamais Guevara n’apparaîtra en public sur l’île.
Cette année-là sonne d’ailleurs le départ du Che vers d’autres cieux. Après avoir démissionné de toutes ses fonctions gouvernementales, Guevara prend la route de l’Afrique subsaharienne, où le Che doit mener personnellement la première action militaire cubaine sur le continent.
La rébellion Simba a éclaté de l’intérieur
Ernesto Guevara part donc en direction du Congo belge, incognito. Il rejoint alors les hommes de Laurent-Désiré Kabila et de Pierre Mulele, accompagné de 130 rebelles cubains. La rébellion Simba, Guevara la connaît bien : le mouvement marxiste a été mené par Patrice Lumumba, assassiné en 1961. Le Che avait, à l’époque, été indigné par cet assassinat dont les conditions restent aujourd’hui encore floues.
Premier ministre, Patrice Lumumba, figure de l’Indépendance qui s’était tourné vers l’URSS en pleine Guerre froide, avait été la première victime d’un coup d’Etat mené par Joseph Désiré Mobutu, un militaire soutenu par la CIA.
Che Guevara débarque à Kibamba. Très rapidement, il se rend compte que la rébellion Simba est affaiblie de l’intérieur. Le Che attend alors Kabila, en exil, et prépare à, comme il l’écrit dans son journal de bord, « cubaniser les Congolais ». Bourré d’idéaux, Guevara veut « construire un camp central au Congo », se souvient Victor Dreke, alors général adjoint de la mission de Cuba au Congo. Mais le Che ne prend pas en compte les spécificités congolaises : un pays vaste, à la géographie diverse… « Il pensait que son histoire amènerait les rapatriés africains à venir dans ce camp pour se préparer et se disperser pour se battre », raconte le militaire.
« Ceci est l’histoire d’un échec… »
Pendant sept mois, Guevara va poursuivre son rêve, celui d’une révolution à la cubaine sur le sol africain. Manque de motivation et de préparation, alcool, discipline hasardeuse… Le Che va se rendre compte que la révolution tant espérée ne prendra jamais. Son statut de héros de la révolution cubaine n’est d’ailleurs pas pris en compte et Ernesto Guevara jouera plutôt le rôle de médecin que de meneur d’hommes au sein de la rébellion.
Dans son journal, le Che raconte le « chaos organisé ». Il introduit même son texte par ces mots très durs : « Ceci est l’histoire d’un échec… » Le 21 novembre 1965, le Che et ses hommes quittent le Congo pour revenir en Amérique du Sud. Trois jours après le départ, comme un symbole, Mobutu prend le pouvoir. Kabila, pour qui le Che voulait se battre, devra de son côté attendre trois décennies avant de s’imposer à la tête du Congo.